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Face à l’instabilité géopolitique, les directeurs financiers français privilégient l’agilité

Le risque géopolitique pèse désormais dans le pilotage quotidien des directeurs financiers. L’étude Deloitte « De la lucidité à l’action : la maîtrise du risque géopolitique par les directeurs financiers », réalisée auprès de 101 CFO d’entreprises françaises1, démontre que 63 % des CFO placent les risques géopolitiques parmi leurs préoccupations majeures, un signe de bascule. 

 

Le risque géopolitique s’installe comme une priorité stratégique des CFO 

Si les directeurs financiers français ont toujours intégré les facteurs géopolitiques dans leurs analyses, la situation actuelle marque un seuil d'intensité inédit. 63 % d'entre eux placent désormais les risques géopolitiques au 2ème rang de leurs préoccupations majeures, derrière l'inflation (68 %) et devant la réduction de la demande (62 %). Près de 40 % des CFO ont d’ailleurs déjà observé un impact de ces risques géopolitiques sur leurs objectifs stratégiques au cours des douze derniers mois, notamment dans le secteur automobile et dans les médias.

Pour les CFO français, la réponse à la volatilité passe d’abord par l’agilité plutôt que par des réformes rigides et irréversibles. Ainsi, 37 % n’ont pas encore engagé d’action concrète car l'ampleur et l'imprévisibilité des enjeux rendent difficile l'engagement dans des transformations définitives. 

L’inflation constitue la conséquence chiffrée des tensions géopolitiques. Les CFO anticipent ainsi une inflation à 4,8 %, contre 1,3 % pour la Banque de France. Une anticipation qui alimente des stratégies défensives alors que 78 % des CFO font de la réduction des coûts une priorité et que 73 % visent une baisse des dépenses d’exploitation. Dans l’industrie et les biens de consommation, la montée des coûts renforce la stratégie défensive adoptée par les directions financières. 

 

Des priorités réajustées en matière de transformation numérique et d’adaptation ciblée des chaînes de valeur 

La transformation numérique est vue comme un levier pour décider plus vite, fiabiliser leurs données, et automatiser les processus financiers face à la fragmentation numérique dans le monde. 

66 % des CFO français placent ainsi la transformation numérique au 3ème rang de leurs priorités stratégiques, dépassant même la croissance sur les marchés existants (57 %) et l'embauche de nouveaux talents (53 %). L'investissement technologique est perçu comme une réponse rapide et efficace aux bouleversements, plus adaptée que des réorganisations profondes. 

En effet, seuls 22 % des CFO font de l’adaptation des supply chains leur priorité stratégique. Bien entendu, certains réévaluent néanmoins leurs implantations industrielles et ils sont 19 % à indiquer qu’ils souhaitent réduire leurs dépendances critiques et 9 % se sont engagés dans des relocalisations effectives. Certains secteurs très exposés ont d’ailleurs réalisé des ajustements importants, notamment dans le secteur automobile où 25 % des entreprises ont relocalisé des modules de production.

Au total, ce sont toutefois 37 % des CFO qui n’ont pas encore pris de mesures concrètes, non par inertie, mais par incertitude. 81 % considèrent ainsi la période actuelle comme non favorable à une prise de risque accrue sur leur bilan. Le pilotage devient alors adaptatif, fondé sur la flexibilité plus que sur des réponses structurelles irréversibles. 

 

Les CFO français apprivoisent l’incertitude plutôt qu’ils ne la subissent 

À l’échelle européenne, les CFO français se distinguent nettement de leurs homologues, par une approche plus analytique et structurée des risques géopolitiques. 

De fait, si 39 % des CFO français constatent un impact direct des risques géopolitiques, ils ne sont que 19,5 % en moyenne en Europe à faire la même analyse. Et pourtant, les Français sont moins nombreux à juger l’incertitude « élevée » : seulement 44 %, contre 64 % ailleurs. En France, l’incertitude est apprivoisée, mieux comprise et intégrée comme un paramètre de gestion. 

Les CFO français privilégient le pragmatisme et sont moins prompts à prévoir des relocalisations que la moyenne européenne (9 % contre 16 %), mais s’investissent davantage dans l’analyse des risques, avec plus de cellules géopolitiques internes (11 % contre 7 %) et plus de prospection active de marchés alternatifs (11 % contre 6 %). 
Cette approche s’accompagne d’investissements ciblés. Ainsi, ils sont 66 % à investir dans la transformation numérique et 22 % prévoient d’augmenter leurs effectifs, avec une priorité sur les expertises data, cybersécurité et reporting ESG/géopolitique. 

Il ressort de l’étude que l’approche française se caractérise par sa capacité à transformer la conscience géopolitique en décisions financières adaptées, sans renoncer aux investissements qui renforcent la résilience. L’association entre lucidité stratégique, rigueur financière et montée en compétences rend l’approche française unique en Europe. 

Mansour Belhiba, Senior Partner et CFO Program Leader chez Deloitte, conclut :

 Dans un monde où les risques géopolitiques se redessinent chaque jour, les CFO français ne cherchent pas à transformer leur organisation trop rapidement. Ils choisissent de privilégier l’agilité de l’organisation permettant ainsi la rapidité et l’efficacité dans l’exécution des réponses à apporter à ces nouveaux risques. 

1 Réalisée entre mars-avril 2025 auprès de 101 entreprises de plus d’1 millions de chiffre d’affaires 

Méthodologie 

Étude réalisée par OpinionWay pour Deloitte du 25 mars au 18 avril 2025 auprès de 101 directeurs financiers d’entreprises privées françaises réalisant plus d’un million d’euros de chiffre d’affaires. L’échantillon est représentatif par secteur, taille et région. Une enquête parallèle a été menée au niveau européen auprès de 1 542 CFO issus de 14 pays (dont Allemagne, Italie, Espagne, Royaume-Uni).