Un article rédigé par Aliette Lefranc et Marine Pochat des équipes Sustainability de Deloitte France.
L'accord historique de la COP 21 a créé un sentiment d'urgence de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). La décarbonation est maintenant à l’agenda de tous les comités de direction des entreprises de l’agroalimentaire. Après avoir concentré les efforts sur la réduction des émissions directes (scope 1) et indirectes (scope 2), l'attention est désormais tournée vers les émissions indirectes liées aux activités externes (scope 3), qui constituent la grande majorité des émissions.
L’initiative internationale « 4 pour 1000 » lancée pendant la COP 21 vise à démontrer le rôle central des sols agricoles dans la lutte contre le changement climatique. Son nom est inspiré de l’étude de l’INRAE1 démontrant qu'une augmentation annuelle de 4 ‰ des stocks de carbone dans les 30 premiers centimètres du sol compense quasiment l'augmentation annuelle de CO2 dans l'atmosphère due aux activités anthropiques (flux nets).
Abritant plus d'un quart des organismes vivants capables de décomposer les matières organiques en composés carbonés stables, les sols représentent un écosystème indispensable à la décarbonation. Les pratiques agroécologiques, telles que les couverts végétaux, permettant de renforcer la capacité du sol à servir de puits de carbone, font partie intégrante des stratégies de décarbonation des entreprises de l’agroalimentaire, au service d’une réduction des émissions de leur chaîne de valeur en amont.
Le déploiement des trajectoires de décarbonation nécessite de pouvoir quantifier, vérifier et piloter l’impact des pratiques agroécologiques sur la santé des sols et la captation du carbone et ce, partout dans le monde et sur des pas de temps longs. Cela demande un effort considérable aux entreprises, qui n'ont d'autre choix que de s’outiller pour limiter le besoin de ressources tant financières qu'humaines. Ce besoin d’outillage est d’autant plus criant que les chaînes d’approvisionnement sont complexes et dispersées.
Dans la plupart des cas, l’objectif est de fiabiliser un engagement d’entreprise sur l’augmentation de la séquestration de carbone, le déploiement de pratiques agroécologiques sur une surface agricole définie ou l’amélioration de la santé des sols. L’enjeu stratégique sous-jacent est d’améliorer la résilience des productions agricoles, de bénéficier de facteurs d’émissions réduits pour sécuriser l’atteinte des engagements pris et de financer la mise en place des pratiques.
Selon les filières et les besoins des entreprises les solutions diffèrent mais in fine, il s’agit d’utiliser une solution de type MRV (monitoring, reporting, vérification). La recherche sur les MRV est très dynamique avec de nombreux outils et modèles disponibles ou en cours de développement. Parmi les multiples définitions d’un outil MRV, nous avons choisi de nous appuyer sur celle du projet européen ORCaSa*. Selon cette définition, un outil de type MRV permet, de façon simultanée, de
*ORCaSa : Operationalising the International Research Cooperation on Soil Carbon. Le graphique a été retravaillé par Deloitte (mise en forme)
Au-delà d’équiper les entreprises dans leurs programmes d’insetting pour réduire les émissions dans leurs chaînes de valeur, les outils de type MRV peuvent également être utilisés pour accompagner les inventaires nationaux dans le cadre de l'accord de Paris et pour déployer les politiques publiques, telles que la Politique Agricole Commune (PAC).
Face aux sollicitations de nos clients et partenaires pour faire les bons choix d’outils de type MRV, Deloitte et l’initiative « 4 pour 1000 » ont réalisé un inventaire des outils de type MRV liés à la santé des sols, en lien avec le carbone. Cet inventaire est accessible à tous via le site web de « 4 pour 1000 ».
Cet inventaire vise à simplifier la prise de décision en identifiant les critères de différenciation des outils et en caractérisant chaque outil selon ces critères. Les critères ont été identifiés suite à une série d’interviews avec des experts sur le sujet des MRV. Ensuite, les porteurs d’outils ont été sollicités pour partager leurs caractéristiques sur ces critères. Il est à noter que la véracité des données renseignées est de la responsabilité des éditeurs de solutions et que ni Deloitte ni « 4 pour 1000 » n’a émis de recommandation vers un outil ou l’autre.
Quelques exemples de critères clés à prendre en considération :
Ce travail d’inventaire n’est qu’une première brique dans une réflexion d’entreprise plus large autour de la stratégie de décarbonation, des leviers au niveau agricole et des outils associés. La nécessité de s’outiller d’un MRV et le choix du MRV en question ne peut s’envisager que dans un contexte spécifique d’entreprise. Il n’existe pas de réponse toute faite. Deloitte et « 4 pour 1000 » se tiennent à votre disposition pour aller plus loin dans vos réflexions sur l’amélioration de la santé des sols agricoles en lien avec le carbone.
Les projets à suivre pour avoir une meilleure compréhension de l'évolution du contexte MRV sont notamment :