L’année 2023 marque un virage majeur pour les entreprises en termes de défaillances. Depuis 2020, les entreprises ont bénéficié d’aides publiques importantes accordées par l’Etat en réponse à la crise économique liée à la pandémie et aux récents évènements géopolitiques. Avec 57 729 défaillances d’entreprises, 2023 retrouve les niveaux d’avant crise sanitaire en atteignant son plus haut historique depuis presque 10 ans. Cela représente une hausse des procédures judiciaires de 36 % par rapport à 2022 et de 70 % en termes d’emplois menacés, qui s’élèvent à 243 700.
Les niveaux records de faillites, enregistrés en 2023, rééquilibrent la situation après le soutien exceptionnel accordé par l’Etat. Mais ce rattrapage aura un impact significatif sur l’économie française des prochaines années.
Dans sa dernière étude sur l’entreprise en difficulté en France en 2023, Deloitte dresse le panorama de cette année qui marque un tournant économique majeur et dévoile ses perspectives pour l’année 2024 au regard de la situation économique, sociale, géopolitique et réglementaire qui s’annonce.
Les défaillances d’entreprises repartent à la hausse de manière homogène sur tout le territoire national. Avec 57 729 procédures collectives (+36 % vs 2022) et 7 822 procédures amiables (+4 % vs 2022), un retour des niveaux de défaillances pré-covid, respectivement proche de ceux observés en 2016 et 2014, est constaté.
Cette augmentation des défaillances généralisée n’égalise pas seulement les niveaux observés d’avant crise sanitaire, mais les dépasse. Une augmentation de 5 727 procédures collectives est observée par rapport à 2019. La défaillance la plus importante est représentée par Casino avec 7 057m€ de chiffre d’affaires alors que la plus grosse défaillances 2022 affichait un chiffre d’affaires de 429m€.
L’augmentation des procédures amiables reste, quant à elle, modérée, compensant la hausse significative des conciliations au niveau national (+32 %) avec la diminution des mandats ad hoc (-9 %).
En 2023, 243 700 emplois sont menacés par l’ouverture d’une procédure collective. Cela représente une hausse de 70% par rapport à 2022 d’autant plus que le nombre de procédures collectives (+36 %). Cette hausse est portée notamment par les entreprises comptant entre 200 et 4 999 employés, au sein desquelles la proportion d’emplois menacés a connu une croissance marquée présentant une augmentation de 15 points entre 2022 et 2023. Une situation préoccupante dont la gravité est illustrée par le top 10 des entreprises de plus de 500 salariés, sélectionnées en fonction du nombre d’emplois menacés, qui concentrent 44 306 postes en péril.
Le rythme de rattrapage du nombre d’emplois impactés s’est accéléré en 2023 en atteignant les niveaux d’avant crise sanitaire. Mais cette tendance à la hausse ne concerne que les procédures collectives, car une tendance inverse est observée dans le cadre des procédures amiables. Le nombre d’emplois menacés pour ces dernières a en effet connu une baisse en 2023 (-15 %), bien que le nombre de procédures amiables soit en hausse (+4 %).
Ce phénomène tient certainement son origine dans la réforme de 2021, laquelle, en application de la directive européenne sur l’insolvabilité, a donné de nouveaux leviers à la sauvegarde accélérée. Sans cette réforme, des groupes importants comme Casino ou Orpea auraient probablement été restructurés par le biais d’une conciliation uniquement, non suivie d’une procédure judiciaire.
A ce titre, l’étude sur l’entreprise en difficulté en France en 2023 est également l’occasion de livrer une analyse comparée dans 10 états membres de l’adoption du concept de classes de parties affectées en Europe.
Une augmentation du nombre des défaillances de près de 36 % a été constatée. L’ensemble des régions s’inscrit dans cette tendance haussière en enregistrant une augmentation des défaillances entre l’année 2022 et 2023, peu volatile par région. Par rapport à la moyenne nationale du nombre des défaillances d’entreprises, 7 régions présentent une augmentation supérieure et 7 une tendance inférieure.
" La tendance haussière des défaillances d’entreprises en 2023 s’explique par un retour à une situation pré-Covid après la suppression des aides d’Etat suite de la reprise de l’économie. Le contrecoup prévisible a engendré une forte hausse des défaillances dans tous les secteurs de l’économie. Il s’agit aujourd’hui d’un retour à la normale, mais il est possible que nous assistions dans les prochaines années à de nouvelles hausses du niveau des défaillances, expression d’un rattrapage des procédures évitées ces 3 dernières années. "
Christophe Guerner, Associé Deloitte Restructuring