La gestion de la succession d’une entreprise familiale est complexe : la décision de s’en séparer, partiellement ou entièrement, est souvent motivée par les désirs et besoins divergents des membres de la famille.
Il est possible que la nouvelle génération ne soit pas intéressée ou prête à prendre la relève. Différents associés ou branches familiales sont peut-être impliqués, chacun nourrissant ses propres aspirations. Pour certains, l’objectif serait de poursuivre la croissance de l’entreprise, tandis que d’autres souhaiteraient plutôt percevoir le fruit de leur participation.
Si une vente est envisagée pour une entreprise familiale, son niveau de préparation influencera sans aucun doute l’intérêt, la valeur et les conditions de la transaction. Avoir une vision exhaustive des options et opportunités qui s’offrent à eux permet aux actionnaires de choisir la voie qui convient le mieux à l’entreprise et à leurs attentes.
L’exercice s’avère d’autant plus compliqué lorsque la question de la succession surgit au même moment qu’une crise de liquidité. Le cercle familial n’a pas toujours, en son sein, un vivier de candidats réellement capables de reprendre le flambeau de la direction et de maintenir le succès multigénérationnel de l’entreprise.
Il est également utile de réfléchir aux avantages que des partenaires externes pourraient éventuellement apporter, qu’il s’agisse d’assurer la liquidité à certains actionnaires familiaux, d’injecter des fonds dans l’entreprise afin d’accélérer sa croissance, ou d’aider la famille à diversifier son portefeuille d’investissements. Il existe une multitude de raisons pour lesquelles une entreprise familiale aurait besoin d’accéder à des capitaux extérieurs - et de nombreuses options le permettent sans céder de contrôle.
Lorsque certains actionnaires familiaux expriment le souhait de céder leur participation et qu’il n’y a pas de consensus familial, il est primordial de trouver la meilleure solution pour éviter à l’entreprise d’entrer dans une zone de turbulences liée à un conflit actionnarial.
L’une des étapes les plus difficiles du processus consiste à trouver un équilibre entre l’envie de maximiser la valeur de la part des sortants, la capacité financière de ceux qui souhaitent poursuivre l’aventure familiale et la juste répartition de la création de valeur entre actionnaires opérationnels et non opérationnels.
Cela pourrait expliquer pourquoi certaines entreprises familiales adoptent des conventions de rachat ou mettent en place une bourse interne.
La cession d'une entreprise familiale est souvent perçue comme une réponse à un besoin de liquidité des actionnaires. Cette vision nous semble réductrice et potentiellement préjudiciable à l'entreprise. En effet, la cession doit avant tout s'inscrire dans une la stratégie de développement de l'entreprise, et répondre ainsi à des impératifs de croissance et de pérennité, et non pas simplement à un sujet de liquidité.
Il existe des solutions pour traiter les besoins de liquidité des actionnaires (ou les besoins de financements de l’entreprise) sans aller jusqu’à la cession de l'entreprise. Par exemple, la mise en place d'un dividende régulier ou le rachat d'actions par l'entreprise. Une des solutions est de mettre en place une bourse interne. Il s’agit d'un mécanisme qui permet aux actionnaires d'une entreprise de vendre leurs actions à d'autres membres de la famille ou à l'entreprise elle-même. C'est une sorte de "marché interne" où les actions de l'entreprise sont échangées.
Ce système peut être particulièrement utile dans une entreprise familiale où il peut être difficile de vendre des actions à des personnes extérieures à la famille, car les pactes d’actionnaires et les droits de préemption limitent les opérations autorisées.
Avec une bourse interne, les actionnaires qui ont besoin de liquidités peuvent vendre leurs actions à d'autres membres de la famille qui souhaitent au contraire se renforcer au capital de l'entreprise. Cela peut offrir, par exemple, l'opportunité aux dirigeants familiaux de renforcer leur participation au capital de l'entreprise. Par ailleurs, pour éviter une concentration excessive du capital, des limites peuvent être fixées sur le nombre d'actions qu'un actionnaire est autorisé à acheter. La mise en place d'une bourse interne nécessite cependant une certaine organisation. Il est important de définir clairement les règles de fonctionnement de cette bourse, notamment en ce qui concerne la fixation du prix des actions. Ainsi, une évaluation régulière de l'entreprise peut être nécessaire pour déterminer la valeur des actions, valeur qui sera la référence pour les transactions entre actionnaires.
Une fois la décision de céder tout ou partie du capital prise, l’étape suivante consiste à placer l’entreprise dans la meilleure position possible pour recevoir des offres solides. De nombreuses entreprises familiales possèdent une expérience d’acquéreurs, mais passer de l’autre côté de la table ne leur est pas forcément familier.
Se préparer en amont permet d’optimiser les conditions et d’éviter de mettre à risque la réalisation de l’opération ou la valorisation. L’accompagnement par des spécialistes sur l’ensemble du processus est un atout indéniable pour présenter au mieux l’entreprise (stratégie, plan de développement, marchés…), pour identifier et mitiger les risques (vendor due diligence). Il est également nécessaire de réfléchir en amont aux impacts fiscaux et d’appréhender les sujets patrimoniaux.
Cette préparation à la cession est une étape cruciale pour assurer une transaction réussie, optimiser les conditions notamment en termes de garanties et maximiser la valeur de l'entreprise.
In fine, il est surtout question de savoir adopter le meilleur positionnement possible au travers de ce processus, de mettre en avant ses atouts et d’avoir anticipé les risques avant d’initier la transaction.
Initier un processus de vente est une décision majeure pour n’importe quelle entreprise, mais cette étape revêt des aspects d’autant plus émotionnels pour les familles, héritières d’une histoire entrepreneuriale. Il est donc d’autant plus important d’aborder ce processus par une préparation factuelle et rigoureuse.