Au-delà de la volonté unanimement partagée de mettre en place une mesure universelle pour faire appliquer une loi inscrite dans le code du travail depuis 45 ans, quel sera l’impact du dispositif pour les entreprises concernées ? Quelles sont les mesures que doivent mettre en place les entreprises pour anticiper les obligations ?
Dès le 1er mars 2019, et chaque année, les entreprises de plus de 250 salariés devront publier sur leur site internet un index relatif aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes et aux actions mises en œuvre pour les supprimer. Les entreprises de 50 à 250 salariés disposeront d’une année supplémentaire pour s’y préparer. La méthodologie repose sur le calcul d'un index noté entre 0 et 100 points et composé de cinq indicateurs.
Cette nouvelle obligation va avoir un effet « booster » pour les entreprises, les obligeant à étudier très précisément le sujet de l’égalité salariale au sein de leur organisation. Elles disposeront d'un délai de 3 ans pour se mettre en conformité. A défaut, les entreprises ne dépassant toujours pas un score de 75 sur 100 s’exposent à des enjeux d’image importants ainsi qu’à des enjeux de pénalité financière.
Pénalités pouvant aller jusqu'à 1% de la masse salariale
Obligation de transparence sur le site internet
Passage de 1 700 contrôles à 7 000 contrôles annuels
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Les entreprises doivent engager un travail de fond pour mesurer et cartographier les écarts existants, en comprendre les origines souvent complexes et indirectes afin de les corriger.
Mesurer, pour savoir de quoi l’on parle. Mesurer ne signifie pas qualifier au travers d’un indicateur unique, l’écart de rémunération existant entre les femmes et les hommes. Il s’agit de cartographier les écarts de rémunération dans l’entreprise afin de les localiser, d’en comprendre l’amplitude, leur poids dans la catégorie professionnelle concernée, dans la filière… Pour cela, l’entreprise peut mettre en œuvre des moyens statistiques classiques, mais également des approches analytiques pour identifier les facteurs explicatifs ou générateurs de ces inégalités.
Comprendre, pour savoir sur quoi agir. Comprendre les causes, c’est comprendre comment les écarts se créent et pourquoi ils se maintiennent. Mais pour comprendre les causes, il convient de s’attaquer aux stéréotypes. Les stéréotypes de genre sont des raccourcis mentaux, des représentations schématiques globalisantes et très largement partagées sur ce que sont, ou ne sont pas les femmes et les hommes. Il convient donc d’identifier les causes réelles, sans tout confondre.
Les inégalités salariales recouvrent en réalité souvent des réalités très diverses, qui dépassent le champ des salaires au sens strict : temps de travail, féminisation de métiers dévalorisés, dynamique de carrières, tranche d’âge, secteur d’activité, taille des entreprises, interruptions de carrières, situation familiale… Ces inégalités ne répondent pas aux mêmes temporalités et ne relèvent pas du même cadre juridique, d’où la nécessité de les distinguer.
Corriger, pour engager des progrès mesurables. Il s’agit de clarifier les effets attendus en définissant un modèle prédictif, puis d’identifier les indicateurs de suivi et de mesure des progrès. Il ne faut pas se limiter au budget de rattrapage comme unique moyen de rattrapage des inégalités identifiées.
Si aucune analyse complémentaire (et action associée !) n’est menée sur les principales causes structurelles de ces inégalités, il y a de fortes chances que ces mesures ponctuelles soient inefficaces et ne permettent pas de corriger sur le long terme les inégalités observées.