La crise sanitaire a contribué à l’émergence de nouvelles interrogations portant sur le système de santé et le rôle des différents acteurs qui composent l’écosystème sanitaire français. La 10ème édition du baromètre « Les français et la santé » réalisé par Deloitte révèle que l’inquiétude des Français concernant l’avenir de leur système de santé, les incite à l’adoption de nouvelles pratiques.
Trois ans après, les conséquences de la crise sanitaire se font toujours autant ressentir dans le quotidien des Français qui aspirent à davantage de modernisation de leur système de santé. Si l’accès aux soins reste une problématique majeure par ailleurs exacerbée par le contexte d’inflation économique, les Français désirent désormais être acteurs de la définition des orientations majeures de leur système de santé. Un constat d’émancipation qui s’observe notamment à travers la démocratisation et l’adhésion en constante évolution de leur rapport avec les nouveaux services et outils numériques mis à disposition sur le marché.
Si les Français sont dans l’ensemble satisfaits de la sécurité et de la qualité des soins, ils manifestent une préoccupation grandissante au sujet de l’accessibilité sous toutes ses formes, qui se traduit par un léger recul des opinions positives jusqu’alors en hausse depuis 2018. Ainsi, les Français souhaitent pouvoir agir par eux-mêmes pour leur propre santé et participer plus activement à la définition des orientations du système de santé (81%). L’étude révèle un souhait croissant de voir le système se moderniser, notamment par le développement de la prévention et l’utilisation de nouveaux outils numériques, comme le recours à l’intelligence artificielle (66%) ou l’application carte vitale (66%).
La gestion de la crise sanitaire a fait émerger une inquiétude importante aux yeux des Français concernant l’accès aux soins, à la fois financier et géographique. Le contexte d’inflation économique tend à renforcer cette tendance : aujourd’hui, plus de trois quarts des Français jugent le prix des médicaments élevés (50%), voire trop élevé (26%).
Concernant l’accessibilité géographique, 56% des sondés se déclarent satisfaits de l’offre de soin dans les territoires, soit un recul de 11 points par rapport à 2021 (niveau le plus bas mesuré sur cet indicateur depuis 2016). L’accessibilité géographique est plus particulièrement décriée par les habitants des communes rurales. Seuls 44% des interrogés ciblés se disent satisfaits de la couverture territoriale de l’offre, soit 12 points de moins que la moyenne nationale.
Face à la formation d’une inquiétude nouvelle portant sur l’accessibilité, les Français souhaitent participer davantage à la définition des futures orientations majeures du système de santé. Ainsi, 81% des sondés disent vouloir être plus et mieux impliqués. Ces derniers attendent aussi un engagement plus fort de la part l’Etat : 64% des sondés attendent un effort financier supplémentaire de la part du Gouvernement, prioritairement vers les hôpitaux.
Parallèlement, les Français souhaitent agir plus directement pour leur propre santé, notamment par l’engagement dans des actes de prévention. Ces derniers soutiennent notamment les mesures prévues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS 2023) pour renforcer les dispositifs de prévention. En effet, 94% des sondés déclarent être favorables à l’instauration de rendez-vous gratuits à trois âges clefs de la vie pour prévenir les facteurs de risques et certaines pathologies. Parmi les maladies qui mériteraient de faire l’objet de programmes de prévention dédiés, les Français citent toujours en priorité le cancer (40%), avec une augmentation de 6 points de plus qu’en 2021, ainsi que les maladies cardio-vasculaires (36%), aussi avec une augmentation de 6 points de plus qu’en 2021.
Les Français déclarent eux-mêmes adopter des pratiques vertueuses en matière de prévention : 72% des sondés agissent pour diminuer ou arrêter certaines mauvaises habitudes comme le tabagisme ou la consommation excessive d’alcool. D’ailleurs plus de 1 Français sur 3 considère sa mutuelle comme un acteur légitime pour l’accompagner sur de la prévention. Mais les Français souhaitent aussi et surtout un engagement des acteurs vers davantage de projets innovants dans le domaine des services sur mesure de santé et de prévention. Ils sont globalement satisfaits (77%) du niveau de remboursement proposé par leur complémentaire santé et peu enclins à vouloir en changer (23%). Seulement, la réforme du 100% santé pourrait accélérer les mouvements de portefeuille et un plus fort recourt à la loi de 2020 puisqu’ils ont constaté et déploré cette année des impacts sur leur cotisation.
La crise sanitaire a accéléré l’émergence de nouveaux services et outils numériques en matière de santé ; une tendance qui s’est pérennisée dans le quotidien des Français. Aujourd’hui, les outils plus utilisés sont ceux relatifs aux prises de rendez-vous en ligne (48%), soit une hausse de 20 points par rapport à 2016 ; et ceux liés à la remise des résultats en ligne (47%). L’étude révèle par ailleurs une tendance croissante des Français à s’ouvrir et tendre vers de nouveaux services numériques de soin. A ce propos, la part des Français s’imaginant recourir à une cabine de téléconsultation a progressé par rapport à 2021, s’établissant aujourd’hui à 72% des interrogés. Concernant le recours à l’intelligence artificielle, 66% des sondés se disent prêts à consulter un médecin qui a recours à l’IA dans l’aide au diagnostic (+4 points par rapport à 2021) si toutes les garanties de sécurité sont respectées.
Néanmoins, si les outils de santé numérique séduisent de plus en plus de Français, ces derniers continuent malgré tout d’exprimer un certain nombre de craintes concernant leurs usages. Au sujet des données de santé, 52% des Français estiment qu’elles ne sont pas suffisamment protégées. La crainte d’un mauvais usage de leurs données de santé est plus particulièrement ressentie avec les acteurs privés et indirectement liés au secteur de la santé. Ainsi, 67% des Français ne font pas confiance aux leaders de la Tech pour traiter leurs données de santé.
Au-delà de l’inquiétude concernant la protection des données qui restent le sujet phare de préoccupation, les principaux freins au recours aux technologiques numériques en matière de santé sont : le sentiment que cela diminue les interactions humaines (33%) et les craintes de risques d’erreurs ou de problèmes techniques (26%).
Les Français identifient le rôle du numérique pour répondre à leurs attentes, notamment lutter contre les déserts médicaux et organiser le maintien à domicile. Sur ces sujets et c’est une surprise, ce sont les seniors qui sont le plus en pointe : par exemple, 47%, contre 32% pour les moins de 50 ans, y voient une solution pour lutter contre les déserts médicaux et 58% des seniors, contre 27% pour les moins 50 ans, y voient une solution pour vivre plus longtemps à domicile.
Quand on interroge les seniors, hygiène de vie (95%) et lien social (68%), sont privilégiés par les seniors pour rester autonomes. Ils considèrent aussi que la prévention contre le cancer ou les maladies cardio-vasculaires (49% v 26% pour les moins de 50 ans) est prioritaire à celle contre la dépendance (35%).
Ils n’en oublient pas pour autant le rôle essentiel du médecin traitant : à 82%, contre 54% pour les moins de 50 ans, les seniors plébiscitent le rôle du médecin, et à 45%, contre 31%, celui de leur mutuelle, pour organiser la prévention.
Les Français, et notamment les seniors, sont prêts à payer pour les services qui les maintiennent en bonne santé. Chaque année, cette tendance se renforce, ce qui incite à imaginer de nouvelles offres par exemple pour lutter contre la dépendance pour lesquelles ils sont prêt à payer 21,50€ par mois ou le handicap avec 43,00€ par mois.
Les seniors pourraient devenir les pionniers d’un modèle de santé numérique, axé sur la prévention, le bien-vivre et le maintien à domicile, en lien avec les acteurs de proximité en qui ils ont le plus confiance.
Les Français sont toujours aussi satisfaits vis-à-vis du niveau de remboursement de leur mutuelle, une tendance qui reste stable par rapport à 2021. Une satisfaction qui se reflète dans les intentions de résiliation puisque seulement 12% des personnes interrogées envisagent de résilier leur contrat de complémentaire santé et ce malgré l’entrée en vigueur de la loi sur les résiliations infra-annuelle.
Légitimé par les Français à hauteur de 37% des répondants pour intervenir en matière de prévention et d’éducation à la santé les mutuelles peuvent ainsi proposer de nouveaux services à leurs adhérents pour lesquels les Français sont aujourd’hui de plus en plus nombreux à être prêts à payer : 25 euros par mois pour des services liés au bien vivre et jusqu’à 30 € par mois pour des services liés au bien vieillir.