Benchmark réalisé à partir de l’analyse des publications de 15 banques européennes dont 6 françaises.
Les principaux points à retenir de l’article concernant les données publiées sur les émissions de gaz à effet de serre (GES) sont les suivants :
Les établissements bancaires ont publié pour la première fois, sur les données du 30 juin 2024, le tableau 1 du Pilier 3 ESG présentant les émissions de gaz à effet de serre financées dans les secteurs contribuant fortement au changement climatique. La réglementation impose d’y déclarer les émissions totales sur les trois scopes (1 + 2 +3), le détail du scope 3 et la proportion des expositions pour laquelle les émissions ont été calculées sur la base de données non estimées, pour chacun de ces secteurs.
A l’instar d’autres publications dans les tableaux du Pilier 3 ESG, les déclarations des établissements bancaires sont fortement hétérogènes, tant sur le fond (certaines banques ont décidé de ne pas déclarer le scope 3 des émissions de GES financées qui représentent en moyenne les 2/3 du total scope compte tenu de l’incapacité à disposer de données suffisamment fiables sur ce scope), que sur la forme (unités de publication). Le retraitement qui consiste à comparer les intensités moyennes sectorielles indépendamment des volumes d’activités permet toutefois de placer les banques françaises légèrement en dessous de la moyenne des autres banques de l’UE. En moyenne 486 tonnes d’émissions financées pour les banques UE du panel contre 401 tonnes pour la banque française la plus émissive et des émissions comprises entre 100 et 200 tonnes pour les autres banques françaises.
Les récentes publications révèlent par ailleurs des similitudes notables dans la répartition sectorielle de ces émissions. Parmi les secteurs analysés, le secteur C (Industrie manufacturière) semble être une source majeure de risques de transition pour les banques (il représente le secteur le plus émissif pour 70 % des banques du panel tout en présentant le taux d’estimation de données le plus faible avec 76 %). Ce secteur, généralement plus émissif, pourrait entraîner des défis importants en termes de gestion des risques liés à la transition vers une économie bas-carbone. À l'inverse, d'autres secteurs moins polluants apparaissent moins vulnérables à ces risques.
La grande variabilité dans le taux d’estimation des données révèle, quant à elle, que certains secteurs bénéficient de données plus complètes et précises, tandis que d’autres reposent largement sur des approximations. Les secteurs tels que l’agriculture (code NACE A), l’hébergement (code NACE I) et l'immobilier (code NACE L) présentent des taux d’estimation de l’ordre de 95 %, suggérant une absence notable de données précises pour ces secteurs et rendant de facto l’évaluation des émissions financées moins fiable.
Cette disparité provient également du modèle d’affaires des institutions financières, en fonction de la proportion de petites et moyennes entreprises (PME) et de grandes entreprises (GE) présentes dans leurs portefeuilles, les informations d’intensité étant bien plus accessibles pour ces dernières.
De façon générale, le taux d’estimation reste cependant très significatif (86 %) montrant la difficulté des banques à disposer de données complètes et fiables sur les émissions de leurs contreparties.
Malgré un standard méthodologique (PCAF avec une analyse bottom-up) retenu par la majorité des banques, le recours extrêmement important aux données approximées et la transparence limitée sur les méthodologies d’estimation ne permettent pas, à date, de positionner définitivement l’intensité en GES du portefeuille d’une banque par rapport à une autre. Pour renforcer la robustesse de ces analyses et améliorer la comparabilité entre secteurs et établissements financiers, il apparait ainsi essentiel d'améliorer l’accès à des données ESG fiables pour les prochains exercices.
Malgré l'engagement des établissements au titre de la Net-Zero Banking Alliance (NZBA), l'absence de standardisation des publications rendait difficile le suivi des progrès réalisés par les banques au fil du temps. Ainsi, pour la publication au 30 juin 2024, les banques européennes ont été tenues de publier, dans leur Pilier 3, le tableau 3 destiné à améliorer le suivi et la comparabilité entre établissements.
Selon les exigences actuelles, un minimum de huit secteurs doit être couvert par les banques, avec des intensités d'émission publiées pour chacun de ces secteurs. Cependant, cette exigence s'avère difficile à satisfaire pour plusieurs raisons. Tout d'abord, les banques ne sont pas nécessairement engagées dans l'ensemble des secteurs requis et ne disposent pas des informations nécessaires pour publier des données complètes et pertinentes sur chaque secteur. Un autre obstacle majeur réside dans l'utilisation des données de l'Agence Internationale de l'Énergie (AIE) pour la comparaison. Bien que l'AIE fournisse des données sectorielles sur les émissions de CO2, celles-ci ne couvrent pas l'intégralité des codes NACE spécifiés par l'Autorité Bancaire Européenne (EBA) (le secteur des « produits chimiques » par exemple).
Ainsi, certaines banques identifient parfois plusieurs paramètres pour un même secteur (par exemple, les engagements bruts en M€ et intensités de GES). Certains établissements ont fourni, quant à eux, la décomposition de secteurs jusqu'au code NACE de niveau 4, comme Santander ou BBVA. D'autres banques ont spécifiquement mentionné certains secteurs, tels que la production d'aluminium (par exemple : BPCE) ou l'immobilier commercial (par exemple : Crédit Agricole).
La présence d’une part considérable de secteurs reportés en intensité (environ 64 % des secteurs hormis celui des produits chimiques, toutes banques confondues) plutôt qu’en valeur absolue, suggère que les établissements privilégient les publications en intensité, en cohérence avec leur autres publications (engagements NZBA notamment)1.
D'un point de vue méthodologique, il apparaît que des clarifications sont nécessaires, notamment en ce qui concerne les méthodes de calcul des deux dernières colonnes relatives à la distance par rapport au scénario ZEN 2050 (jalon 2030) et à la cible à trois ans.
La difficulté de comparer les publications de trajectoires des établissements provient donc majoritairement des hypothèses ou simplifications méthodologiques retenues par les établissements compte tenu de difficultés opérationnelles notamment dans le contexte d’une première publication ou de choix assumés au regard de la pertinence des informations à publier.
L'envoi de ces tableaux aux autorités dans le cadre de la collecte organisée par l'EBA et faisant d’ailleurs l’objet de plusieurs questions dans son Single Rulebook Q&A devrait permettre, a minima, de traiter une part de l’hétérogénéité constatée à ce jour dans les pratiques de remplissage des tableaux.
1 A noter que le Q&A EFRAG prévoit un délai de 3 ans pour la publication des émissions en valeur absolue à partir de la première année de déclaration.
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