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Interview avec Markus Blanka-Graff - CFO Kuehne+Nagel Group

Markus Blanka-Graff, CFO Kuehne + Nagel Group

Markus Blanka-Graff est Chief Financial Officer et membre de la direction de Kühne + Nagel International AG depuis le 1er juillet 2014.

Après des études d'économie, l’Autrichien débute sa carrière professionnelle en 1996 au sein de la société nationale de Kühne + Nagel à Vienne. Dans le domaine financier, il a occupé des postes de cadre, notamment en Asie, en Europe et en Amérique du Nord, ainsi que, depuis 2009, au niveau corporate, et a acquis une expérience de gestion variée dans l'intégration d'acquisitions d'entreprises et la standardisation des processus financiers et de contrôle de gestion à l'échelle mondiale. Lors du CFO Day 2021, il a reçu le prix du CFO-of-the-Year pour ses performances.

Deloitte : Selon vous, de quelle manière la pandémie transformera le rôle des directeurs financiers de manière durable ?

Markus Blanka-Graff : La flexibilité du modèle économique et la variabilité des coûts prendront une place encore plus importante dans la gestion des affaires. Il sera également plus important d’avoir un bilan solide et de bénéficier d’une indépendance dans les décisions financières. Les directeurs financiers devront de plus en plus se battre pour cela, même si les objectifs à court terme peuvent s’y opposer.
 

Deloitte : La question de durabilité prend de plus en plus d’importance. En tant que directeur financier, de quelle manière pouvez-vous aider votre entreprise dans ce domaine ?

Markus Blanka-Graff : La durabilité n’est pas une « tâche supplémentaire », mais une composante essentielle de l’activité. Pour les directeurs financiers, cela implique de peser les objectifs à long terme par rapport aux objectifs à court terme et de participer à l’organisation de l’entreprise afin d’asseoir sa place dans la société. Tous les éléments de la durabilité en font partie.
 

Deloitte : Quelles sont les opportunités offertes par la numérisation, et quelles en sont les limites ?

Markus Blanka-Graff : La numérisation va continuer à progresser : dans les tâches répétitives et les processus standardisés, ainsi que dans l’aide, notamment avec l’IA, à la prise de décision pour élaborer des propositions. Les limites se situent au niveau des tâches de gestion d’entreprise et opérationnelles. C’est d’autant plus le cas maintenant, à une époque où les chaînes d’approvisionnement sont soumises à d’énormes tensions, que la créativité et la communication humaines sont nécessaires.
 

Deloitte : La dernière enquête auprès des directeurs financiers révèle que les problèmes de chaîne d’approvisionnement sont considérés par beaucoup comme le plus grand risque actuel. Quelle est selon vous l’ampleur de ces problèmes et comment les gérez-vous ?

Markus Blanka-Graff : La problématique de la chaîne d’approvisionnement est née d’une accumulation de points de friction. La plupart des points de friction existent depuis de nombreuses années, voire des décennies, et ont été provoqués par les conflits d’intérêts latents des propriétaires d’actifs matériels nécessaires dans la chaîne d’approvisionnement. Un exemple : l’armateur veut des navires toujours plus modernes et plus grands, en raison de l’amélioration de l’efficacité, des coûts ainsi que du bilan environnemental. Mais pour cela, le port doit construire des quais plus longs et des bassins plus profonds ainsi que des grues plus performantes. L’exploitant du port devrait alors travailler si possible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, mais pour cela, il est nécessaire de développer le raccordement ferroviaire. Il faut également suffisamment de camions, de semi-remorques et de chauffeurs et les cadencer avec précision. Les routes qui partent des ports doivent pouvoir résister à cet afflux. Les régulateurs introduisent en outre des étapes de contrôle supplémentaires. Chaque participant au système agit pour de bonnes et justes raisons, mais pas de manière coordonnée avec les autres participants. Lors de la pandémie, le système a pratiquement périclité, d’abord parce qu’il n’y avait pas de capacités disponibles, puis parce qu’il a été frappé par une vague de demande provenant du commerce électronique. Cette dynamique a été très différente selon les régions et s’est particulièrement fait sentir aux États-Unis. Ce système s’est donc retrouvé dans une situation de déséquilibre considérable. Certains incidents, comme le blocage du canal de Suez, ont encore aggravé la situation. Dans ces circonstances, nous essayons d’offrir à nos clients le meilleur service possible, mais cela ne signifie malheureusement pas que tout le monde en soit satisfait. Lorsque leur marchandise reste bloquée pendant plusieurs semaines dans une partie de la chaîne et que les prix se sont multipliés, cela engendre de la frustration. Nous essayons d’aider nos collaborateurs du mieux que nous pouvons à faire face à ces pressions, mais c’est difficile.
 

Deloitte : Il ressort de l’enquête auprès des directeurs financiers que la plupart d’entre eux prévoient une augmentation du chiffre d’affaires. Quelles sont vos prévisions pour votre entreprise pour l’année en cours et l’année prochaine ?

Markus Blanka-Graff : Le chiffre d’affaires est moins significatif pour nous ; le bénéfice brut est l’indicateur le plus pertinent et il a fortement augmenté en 2021. Cela est dû, d’une part, à des volumes qui augmentent à nouveau fortement et, d’autre part, à la dynamique du marché qui se caractérise par une pénurie de capacités et l’énorme augmentation des dépenses pour accompagner les envois avec toutes les difficultés que cela implique à travers les chaînes d’approvisionnement et pour pouvoir offrir le meilleur service aux clients dans les circonstances données.

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