Interview avec Alexandra Post

swissVR Monitor : L'entreprise Schenk se trouve dans un secteur en pleine mutation, sur fond d'internationalisation, de pression sur les prix et de changement des habitudes de consommation. Quels sont, selon vous, les facteurs qui expliquent cette résilience ?

Alexandra Post : Tout d’abord, le groupe est une entreprise familiale depuis quatre générations, ce qui explique que la culture d’entreprise est axée sur le long terme. Cette approche lui a permis de mettre en place un socle de valeurs communes, même dans un contexte de transformation profonde du secteur. Par ailleurs, dès la deuxième génération, le groupe a opté pour une stratégie de mitigation des risques avec des vignobles et des activités de vinification dans plusieurs pays (Espagne, Italie, France, Suisse) et une distribution dans plus de 70 pays. Cette diversification réduit la vulnérabilité face aux aléas climatiques, économiques et réglementaires. De plus, il existe une forte cohésion entre le Conseil et la direction sur la stratégie et sa mise en œuvre. Enfin, nous nous remettons en question et sommes conscients que notre offre et notre distribution doivent encore évoluer pour s’adapter davantage aux nouveaux modes de consommation. C’est une mission à laquelle nous sommes complètement dédiés !

swissVR Monitor : Comment le conseil d'administration peut-il, dans sa fonction stratégique, influencer positivement la résilience organisationnelle ?

Alexandra Post : Le conseil d’administration peut jouer un rôle majeur en favorisant la transparence sur le contexte du marché et la situation de l’entreprise, ce qui favorise une même compréhension des enjeux. Il est aussi essentiel qu’il soutienne le leadership dans les périodes difficiles : il doit pouvoir exprimer des doutes et remettre en question l’orientation avant la prise de décision, puis apporter un soutien indéfectible une fois la décision arrêtée. Cette attitude renforce la confiance mutuelle. Enfin, une communication claire – dire ce que l’on fait et faire ce que l’on dit – ainsi que des décisions concertées et bien expliquées contribuent à réduire l’incertitude et à consolider la résilience collective.

swissVR Monitor : Selon notre enquête auprès des membres des conseils d'administration, l'un des principaux obstacles auxquels se heurtent les entreprises est le manque de personnel axé sur la résilience. Qu'est-ce que cela signifie pour le conseil d'administration ? Faut-il faire appel à un spécialiste de la résilience ?

Alexandra Post : Il n’est pas forcément nécessaire de nommer un spécialiste dédié à la question de la résilience ou à la culture d’entreprise. Ce qui compte avant tout, c’est que le conseil d’administration soit crédible et inspire confiance. Il doit réunir des personnes expérimentées, aux compétences complémentaires, capables de garder leur sang-froid et de prendre de la hauteur quand l’environnement est anxiogène. Il s’agit de trouver un équilibre, parfois délicat, entre exigence et empathie. J’ai toujours apprécié les conseils qui combinent des profils rationnels, qui gardent un certain recul, et d’autres plus attentifs à l’impact humain des décisions : c’est souvent une combinaison particulièrement efficace.

swissVR Monitor : Selon notre étude, seule une minorité des directions d'entreprise fait régulièrement un rapport au conseil d'administration sur la résilience écologique (mot-clé : durabilité). Selon vous, cette thématique est-elle facultative ou indispensable ?

Alexandra Post : Pour nous, c’est essentiel. La famille actionnaire a des convictions environnementales fortes. Chaque année, nous revoyons la stratégie de durabilité en conseil d’administration et faisons le point sur les progrès accomplis en vue de la réalisation de nos objectifs. Jusqu’à présent, nos priorités étaient la réduction de l’empreinte carbone et l’agriculture biologique. Cette année, nous élargissons notre démarche à d’autres critères ESG, comme la biodiversité et la gestion de l’eau. Les avancées réalisées dans notre secteur constituent des points de comparaison et de référence précieux qui nous permettent de nous positionner et d’identifier d’autres possibilités d’amélioration.

swissVR Monitor : Quels sont les aspects qu’un rapport sur la résilience écologique doit traiter en priorité lorsqu’une entreprise souhaite réaliser un tel rapport ?

Alexandra Post : Cela dépend bien sûr fortement du secteur d’activité. Dans notre cas, le rapport devrait principalement se concentrer sur le bilan carbone, la viticulture biologique et, plus largement, sur tous les indicateurs clés qui traduisent les engagements environnementaux et sociaux de l’entreprise.