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Fort recul des activités M&A – les PME suisses affichent en revanche un nombre record d’acquisitions d’entreprises étrangères

Zurich/Genève, le 16 février 2024

Les tensions sur le marché mondial ont également des répercussions sur l’activité mondiale des rachats d’entreprises. Les activités M&A mondiales sont retombées à leur niveau de 2005. La Suisse n’est pas épargnée et enregistre-t-elle aussi un net recul des activités d’acquisition : par rapport à l’année précédente, les acquisitions et les fusions portant sur des PME suisses ont ainsi diminué de plus de 13%. Toutefois, parallèlement à un net recul du volume d’acquisitions de PME suisses par des entreprises étrangères, les PME helvétiques ont légèrement augmenté leur activité M&A à l’étranger. Elles ont surtout profité de la vigueur du franc suisse. Pour l’année 2024, les prévisions s’inscrivent dans un optimisme prudent en raison d’une croissance économique qui devrait rester faible.

 

Dans l’ensemble, les PME suisses ont conclu nettement moins de transactions en 2023 qu’au cours de l’année précédente. Entre janvier et décembre 2023, 211 opérations ont été réalisées (contre 244 en 2022), ce qui correspond à un reflux de 13,5%. C’est ce que révèle l’actuelle étude Deloitte sur l’activité M&A des PME suisses. Le principal moteur négatif réside dans les transactions Inbound – c’est-à-dire celles portant sur les activités pour lesquelles les PME suisses ont été la cible d’acquisitions étrangères. Ces dernières ont en effet reflué de plus d’un tiers, à 64 transactions (–34,7% par rapport à 2022). Il s’agit du niveau le plus bas depuis 2015.

La situation est plus positive sur le front des acquisitions d’entreprises étrangères par les PME suisses. Il s’agit-là d’une tendance qui s’est déjà amorcée en 2022 : alors que dans le passé, les transactions transfrontalières étaient principalement boostées par des investissements Inbound, on observe depuis la mi-2022 une activité accrue sur le front des transactions Outbound (voir graphique 1). Ainsi, les PME suisses ont opéré davantage en tant qu’acquéreurs d’entreprises étrangères et ont moins souvent été la cible de fusions ou d’acquisitions par des investisseurs étrangers. En 2023, le nombre de fusions et acquisitions réalisées à l’étranger par les PME suisses a encore légèrement augmenté (+1,3%) par rapport à une année 2022 déjà marquée par un niveau élevé. Au total, le nombre d’acquisitions d’entreprises étrangères par des PME suisses s’est établi à 76. Il s’agit du chiffre le plus élevé depuis que Deloitte a commencé l’enquête, en 2013.

Les transactions domestiques, c’est-à-dire les acquisitions de PME suisses par des entreprises elles-mêmes suisses, sont restées inchangées, à 71 transactions – un chiffre qui se situe dans la moyenne de ces dix dernières années. Sur l’ensemble de l’année 2023, les activités M&A des PME suisses ont connu un ralentissement entre le premier et le deuxième semestre. Pour Anthony West, associé et responsable Corporate Finance Suisse chez Deloitte, plusieurs raisons expliquent une telle évolution : « Pour les PME suisses, la vigueur du franc suisse fait des entreprises étrangères des cibles attrayantes pour les acquéreurs potentiels, ce qui explique la hausse continue des transactions. La situation se présente différemment du côté des investisseurs étrangers : l’inflation nettement plus élevée, conjuguée aux craintes de récession et au contexte économique difficile, a conduit à une plus grande prudence chez les entreprises et les investisseurs avec, comme corollaire, un recul tenace des fusions et acquisitions en Suisse. »

Activité d’acquisition soutenue dans l’industrie et l’informatique

 

Avec plus de 81% de toutes les activités M&A Inbound enregistrées dans le pays, la Suisse alémanique se taille la part du lion. Et avec plus de 40 transactions, ce sont les entreprises du canton de Zurich qui remportent la palme des activités M&A en Suisse. Les investisseurs européens sont tout particulièrement intéressés par les PME suisses : ils sont en effet responsables de près des trois quarts (73%) de l’ensemble des transactions Inbound réalisées. Le premier marché national est l’Allemagne, suivie par les États-Unis (voir graphique 2). Le fait que l’Allemagne demeure le plus grand marché national est d’autant plus remarquable que le pays est entré en récession l’année dernière.

L’examen des secteurs qui retiennent l’attention des investisseurs étrangers est également révélateur : en 2023, les premières cibles de rachats ont été les entreprises industrielles, les sociétés informatiques et éditrices de logiciels (21% dans les deux cas), suivies par les entreprises opérant dans le secteur des sciences de la vie et de la santé (16%). Tandis que l’intérêt des investisseurs étrangers s’est porté principalement sur les entreprises suisses de l’industrie et des services informatiques, les cibles des activités d’acquisition des PME helvétiques à l’étranger ont avant tout été des entreprises du secteur de l’industrie (28%) ainsi que des sciences de la vie et de la santé (20%).

« Pour l’industrie suisse de même que pour les entreprises informatiques et éditrices de logiciels helvétiques, ces chiffres sont un gage de qualité », déclare Stephan Brücher, associé Financial Advisory chez Deloitte Suisse. « Le vif intérêt des investisseurs étrangers pour ces domaines souligne l’importance du paysage suisse des PME et de la communauté des start-up du pays. Ces dernières proposent des services informatiques et logiciels et fabriquent des produits leaders sur le marché mondial qui sont, de ce fait, très attractifs pour les investisseurs étrangers. C’est le cas notamment dans le domaine de la technologie médicale. Cependant, le reflux particulièrement marqué des rachats par des entreprises étrangères montre que les PME suisses sont de plus en plus inabordables pour les acheteurs étrangers, notamment en raison de la vigueur du franc suisse. À long terme, cela peut conduire à une pénurie d’investissements pourtant plus nécessaires que jamais pour les entreprises, par exemple pour le développement de produits », avertit toutefois Stephan Brücher.

Recul des activités de capital-risque

 

Les fonds de capital-risque opèrent en dehors des marchés boursiers, et il est fréquent qu’ils rachètent des entreprises pour les transformer et les revendre plus tard en empochant un bénéfice ou les introduire en bourse. Sur le front des rachats d’entreprises par des fonds de capital-risque, on observe là aussi une tendance à la hausse des transactions nationales, à mettre en regard avec une baisse des investissements étrangers. Sur 2023, les acquisitions de fonds de capital-risque ont reculé de 18%, à 77 transactions (contre 94 transactions en 2022). Sont concernées au premier chef les transactions Inbound réalisées par des acheteurs étrangers. En revanche, les acquisitions de PME suisses par des fonds de capital-risque eux-mêmes suisses ont accusé une forte augmentation. Elles représentent désormais 42% de l’ensemble des acquisitions, le chiffre le plus élevé jamais enregistré depuis 2013. Ce dernier point s’explique par les coûts de financement (taux d’intérêt), qui demeurent relativement bas en Suisse.

Une situation tendue qui ne se prête guère qu’à des perspectives en demi-teinte

 

Selon les chiffres du Secrétariat d’État à l’économie, l’année en cours devrait être marquée par une légère croissance économique de 1,1% – un chiffre sensiblement inférieur à la moyenne historique. Cette perspective s’explique d’une part par les répercussions à long terme de la pandémie, d’autre part par l’actualité géopolitique et par une évolution économique timide – dans le meilleur des cas –, sans oublier le blocage des réformes sur les principaux marchés. Les effets du resserrement de la politique monétaire visant à réduire l’inflation, conjugués à la perspective d’efforts d’austérité sur fond d’endettement élevé et à une croissance économique léthargique, pèsent également sur le moral des investisseurs.

La baisse des transactions M&A en 2023 a engendré l’accumulation d’un potentiel d’investissement pour l’année en cours. Jean-François Lagassé, vice-président et responsable du secteur des services financiers chez Deloitte Suisse : « Le marché suisse des fusions et acquisitions pourrait montrer des signes de légère reprise en 2024. Cet optimisme prudent repose sur la baisse probable des taux d’intérêt par les banques centrales des économies développées et par l’accumulation des transactions en souffrance héritées de 2023, à un moment où les prévisions de croissance économique font preuve d’une très grande prudence. »

À propos du rapport M&A

L’étude Deloitte sur l’activité M&A des PME suisses analyse les transactions de fusion et de reprise (acquisition de participations majoritaires) des petites et moyennes entreprises (PME) suisses entre le 1er janvier et le 31 décembre. Deloitte définit une PME comme une entreprise réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 10 millions de francs suisses, employant moins de 250 personnes et affichant une valeur d’entreprise comprise entre 5 et 500 millions de francs suisses.

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