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Investissement dans l’IA : où se trouve le véritable RI

Par Nihar Dalmia, leader de l’activation du marché GenAI pour Deloitte Canada

Il y a quelques semaines, un nouveau rapport de Deloitte a été publié, mettant en évidence le paradoxe entre l’augmentation des dépenses organisationnelles dans la technologie IA et le rendement de l’investissement (RI) difficile à atteindre en Europe et au Moyen-Orient.

Si vous n’avez pas lu l’article, il présente des points incontournables. Lisez-le ici : Le rendement de l’IA – Le paradoxe de l’augmentation des investissements et des rendements difficiles à atteindre (en anglais seulement).

Avant de partager mon point de vue sur l’IA et le RI, je souhaite vous donner un aperçu des informations présentées dans l’article.

Voici mes principales réflexions concernant le rapport :

  • 85 % des organisations ont augmenté leur investissement en IA au cours de la dernière année et 91 % prévoient de l’augmenter à nouveau – pourtant, seulement 6 % ont vu un rendement des investissements en moins d’un an.
  • Le RI des cas d’utilisation typiques de l’IA prend environ 2 à 4 ans, soit beaucoup plus longtemps que l’attente habituelle de 7 à 12 mois pour de nombreux investissements technologiques.
  • Les principaux obstacles à l’obtention du RI incluent des bénéfices intangibles (p. ex. : meilleures relations avec les fournisseurs), des données/infrastructures fragmentées, une technologie évoluant plus rapidement que les mesures, des enjeux liés à l’adoption humaine et le fait que l’IA soit liée à une transformation organisationnelle plus large.
  • Les organisations continuent d’investir parce qu’elles considèrent l’IA comme un impératif stratégique, mais cela est souvent motivé par la crainte de prendre du retard et la conviction d’une valeur à long terme, et non par des retours à court terme clairement identifiés.
  • Les « leaders du RI en IA » à haute performance se distinguent en repensant les modèles d’affaires, en adoptant une approche centrée sur l’humain, en utilisant des mesures de RI adaptées et en favorisant une culture de la littératie en IA à grande échelle.
  • Il existe une différence marquée entre l’IA générative et l’IA agentique. L’IA générative peut offrir un RI mesurable en environ un an, alors que l’IA agentique (systèmes autonomes de processus de bout en bout) est plus complexe et la plupart s’attendent à un RI dans un délai de 1 à 5 ans.

Et voici ce que l’article recommande de faire différemment :

  • Considérer l’IA comme un levier de transformation des affaires, et non simplement comme une mise à niveau technologique
  • Allouer un budget significatif et faire de l’IA une priorité stratégique
  • Intégrer la conception centrée sur l’humain et la gestion du changement
  • Rehausser la gouvernance et l’engagement des dirigeants
  • Utiliser des cadres de mesure du RI adaptés et évaluer sur des horizons temporels réalistes
  • Établir des bases solides en matière de données et une architecture prête à évoluer à grande échelle

Mais selon moi, il y a plus dans cette histoire...

Nous vivons actuellement une période de battage médiatique autour de l’IA et de la pression à investir. Mais les rendements, jusqu’à présent, restent difficiles à obtenir. Dans tous les secteurs, l’écart se creuse entre la vitesse à laquelle les organisations investissent dans l’IA et leur lenteur à se préparer réellement à en tirer de la valeur.

Je le constate chaque jour. Les organisations se lancent dans des investissements majeurs en IA générative et agentique, mais leur niveau de préparation ne suit pas. Cela se traduit par des enjeux de qualité des données, de gouvernance, de refonte des processus ou de culture organisationnelle. Lorsque l’on investit rapidement mais que la préparation tarde, cela crée un fossé où la valeur s’échappe.

C’est le paradoxe au cœur de l’article. La valeur de l’IA est bien réelle. Mais pour beaucoup, elle est fragmentée, distribuée de façon inégale, et il faudra encore plusieurs années avant qu’elle soit pleinement réalisée.

Selon mon expérience, beaucoup d’organisations considèrent le RI uniquement comme un calcul financier

Mais c’est une vision trop étroite pour une technologie aussi transformatrice et à long terme que l’IA. Ces investissements ne s’inscrivent pas facilement dans des périodes de remboursement trimestrielles. Mesurer le RI de l’IA, c’est un peu comme mesurer le rendement d’Internet en 1998. Les avantages mettent des années à se concrétiser et apparaissent souvent là où on ne les attendait pas.

Dans le secteur public (où je passe beaucoup de temps à travailler avec des clients), le rendement prend un tout autre sens. L’IA ne réduit peut-être pas les budgets ni n’augmente les revenus, mais elle peut traiter les demandes plus rapidement, réduire les erreurs et améliorer la prestation de services. Ces résultats ne se traduisent pas nécessairement par des gains financiers, mais ils créent une immense valeur humaine.

Il existe aussi un biais d’autoévaluation. Les dirigeants voient souvent la valeur de l’IA dans les économies de coûts et l’efficacité. Mais si vous demandez à ceux qui utilisent réellement ces outils, vous entendrez autre chose : ils se sentent plus créatifs, plus productifs et plus épanouis au travail. Ils peuvent en faire plus avec moins et apprécient davantage leur emploi. C’est aussi du RI, mais il est simplement plus difficile à mesurer.

Ce que je pense que l’article sous-estime…

Le rapport évoque, sans vraiment approfondir, la plus grande problématique : la préparation organisationnelle.

La technologie n’est que rarement le véritable enjeu. Ce sont les personnes, les processus et la gouvernance qui déterminent si l’IA réussit ou échoue. Le RI est difficile à atteindre non pas parce que le modèle ne fonctionne pas, mais parce que l’intégration et la mise à l’échelle échouent. Les dirigeants sous-estiment l’ampleur de la gestion du changement, de la collaboration interfonctionnelle et de l’alignement de la direction nécessaires pour transformer des projets pilotes en programmes robustes, ou des outils d’IA en véritables coéquipiers numériques.

La gouvernance et les incitatifs sont également essentiels. Sans les bons cadres de supervision, de responsabilité et d’appétit pour le risque, les organisations se retirent avant d’avoir réalisé la valeur. Et si la culture n’évolue pas pour favoriser l’expérimentation, même les meilleurs modèles resteront inutilisés.

L’adoption de l’IA n’est pas une course. Les véritables gagnants traiteront leur main-d’œuvre IA comme ils traitent leur main-d’œuvre humaine : ils l’embaucheront, la formeront et l’amélioreront avec le temps. C’est un engagement à long terme, pas un achat ponctuel.

S’il y a une chose que je veux que vous reteniez, c’est celle-ci :

Investissez dans l’IA… mais investissez tout autant dans la préparation de votre organisation à l’utiliser.

Cela signifie former des équipes interfonctionnelles qui brisent les silos entre la technologie, les données et les affaires. Mettre en place des cadres de gouvernance qui encouragent la prise de risques, plutôt que de la freiner. Rehausser les compétences de votre personnel pour collaborer avec l’IA, et non la contourner. Et considérer l’adoption comme une transformation continue, pas comme un projet ayant une date de fin.

Si vous n’êtes pas prêt à diriger, soyez un suiveur rapide. Apprenez des autres, bâtissez des partenariats et évitez de réinventer la roue. La prochaine phase de maturité en IA ne sera pas déterminée par ceux qui dépensent le plus, mais par ceux qui intègrent, mettent à l’échelle et soutiennent la valeur le plus efficacement.

Alors, avant d’investir un dollar de plus dans l’IA, demandez-vous : « Si j’attends que ma technologie performe, est-ce que je prépare mon organisation à évoluer tout aussi rapidement? »

C’est là que se trouve le véritable rendement.

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Discutons de la façon dont vous pouvez aller au-delà de l’expérimentation pour intégrer l’échelle et la valeur dans votre chaîne de valeur IA.

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