L’objectif de l’étude de Deloitte est de comprendre l’impact financier de l’impôt minimum de l’OCDE sur les 50 plus grands groupes suisses cotés en bourse pour l’exercice 2024. L’étude porte sur des groupes suisses représentés soit dans le Swiss Market Index (SMI), soit dans le Swiss Mid-Cap Index (SMIM). Étant donné que l’exercice financier de certains groupes ne coïncide pas avec l’année civile, le périmètre de la présente étude se limite à un peu moins de cinquante groupes. L’étude ne n’appuie que sur les données accessibles au public ainsi que sur les informations des états financiers audités : il s’agit en l’occurrence de présentations aux investisseurs et de déclarations officielles de CFO. L’étude de Deloitte Suisse sur l’impact de l’impôt minimum de l’OCDE fournit une vue d’ensemble détaillée des conséquences financières pour les groupes suisses analysés.
En raison d’un manque d’informations et de données accessibles au public sur les groupes suisses non cotés et sur les filiales suisses de groupes étrangers, cette étude ne livre pas un aperçu complet des recettes fiscales supplémentaires pour la Suisse au cours de l’exercice 2024. Néanmoins, les résultats des groupes analysés permettent de dégager quelques premiers éclairages.
Avec le projet d’impôt minimum, l’OCDE et le G20 prévoient de soumettre les groupes multinationaux générant un chiffre d’affaires annuel consolidé supérieur à 750 millions d’euros (au niveau du groupe) à un taux d’imposition minimum de 15% dans chacune des juridictions concernées. Si le taux d’imposition dans une juridiction est inférieur à 15%, l’écart avec ce pourcentage sera soumis à un impôt complémentaire. Chaque juridiction peut décider sur une base volontaire d’appliquer unilatéralement les règles de l’impôt minimum de l’OCDE. Si tel est le cas, la juridiction concernée est néanmoins tenue de se conformer pleinement au cadre fixé par l’OCDE. Cette conformité est soumise à un processus d’évaluation par les pairs.
La perception des impôts complémentaires s’effectue selon une démarche en trois étapes. Chaque juridiction peut taxer la différence entre son propre taux d’imposition et le taux de 15% au moyen d’un impôt complémentaire minimum national. Si une juridiction décide de ne pas prélever cet impôt, la juridiction de l’entité mère ultime (ou d’une société holding intermédiaire) est en droit de taxer les bénéfices des filiales étrangères détenues directement ou indirectement au moyen d’un impôt complémentaire international conformément à la Règle d’inclusion du revenu (« RDIR »). Si la juridiction de la société mère ultime du groupe n’a pas mis en œuvre la RDIR, toutes les autres juridictions dans lesquelles le groupe possède des filiales peuvent imposer les bénéfices insuffisamment imposés en application de la Règle relative aux paiements insuffisamment imposés (« RPII »).
Afin d’alléger la charge administrative pesant sur les groupes et les administrations fiscales au cours de la phase initiale, le cadre de l’OCDE a instauré des régimes de protection (« safe harbour rules ») à titre temporaire pour la période 2024 à 2026. Si l’un des trois critères est rempli dans une juridiction, le groupe est exempté de l’impôt minimum de l’OCDE. Une fois que ces règles temporaires expirent, le groupe est soumis au calcul complet de l’impôt minimum de l’OCDE dans la juridiction dont il relève. L’OCDE débat actuellement de l’opportunité de pérenniser cet allègement temporaire sous une forme ou une autre.
À l’occasion d’une votation publique, près de 80% du corps électoral de même que les cantons dans leur intégralité ont approuvé l’adoption de l’impôt minimum de l’OCDE en Suisse. Le Conseil fédéral a ensuite procédé à l’introduction de l’impôt minimum de l’OCDE en deux étapes : le 1er janvier 2024 (impôt complémentaire national) et le 1er janvier 2025 (impôt complémentaire international en vertu de la RDIR). Pour des raisons politiques et de sécurité juridique, le Conseil fédéral s’est pour l’heure abstenu d’introduire l’impôt complémentaire international au sens de la RPII.
Le Conseil fédéral estime que l’impôt minimum de l’OCDE va affecter « quelques centaines » de groupes suisses (cotés ou non) et « quelques milliers » de groupes étrangers détenant des filiales en Suisse. En outre, le Conseil fédéral a émis une estimation prudente des recettes fiscales annuelles supplémentaires au cours des premières années, qu’il situe dans une fourchette de 1 à 2,5 milliards de francs.
Bien que la plupart des groupes suisses cotés en bourse analysés dans la présente étude entre dans le cadre de l’impôt minimum de l’OCDE sur la base de leurs revenus consolidés, un tiers d’entre eux ne sont redevables d’aucun impôt complémentaire pour l’exercice 2024, et ce, ni en Suisse ni à l’étranger. Les raisons de cette exemption sont diverses, mais les groupes bénéficient notamment de régimes de protection temporaires.
Les impôts complémentaires des groupes concernés s’élevaient à 243,2 millions de francs, payables à la fois en Suisse et dans d’autres juridictions fiscales. Un groupe à lui seul y a contribué à hauteur de 189,0 millions de francs, soit les trois quarts des prélèvements totaux.
Bien qu’il ne soit pas possible de ventiler le total entre les impôts complémentaires payables en Suisse et ceux payables dans les autres juridictions, Deloitte Suisse estime le montant payable en Suisse à moins de 200 millions de francs. Sur la foi des informations actuellement disponibles, on peut s’attendre à ce que l’objectif de recettes fiscales supplémentaires de 1 à 2,5 milliards de francs au cours des premières années ne soit pas atteint.
Les 50 plus grands groupes suisses cotés en bourse s’acquittent au total de 243,2 millions de francs d’impôts supplémentaires, en Suisse et à l’étranger.
Seul un tiers des plus grands groupes suisses cotés en bourse sont financièrement impactés par l’impôt minimum de l’OCDE.
Avec 189,0 millions de francs, un groupe contribue à lui seul au montant total des impôts complémentaires, soit à hauteur de 78%.
Le montant estimé des impôts complémentaires payables en Suisse (moins de 200 millions de francs) représente 8 à 20% des recettes fiscales supplémentaires attendues.
À l’heure actuelle, les impôts complémentaires n’affectent qu’une petite partie des groupes cotés en bourse. Un grand nombre d’entre eux bénéficient des régimes de protection temporaires. Dans l’ensemble, les recettes issues des impôts complémentaires pour l’exercice 2024 devraient être bien en deçà des estimations initiales du Conseil fédéral.
Les régimes de protection temporaires ne sont pas permanents, et la situation pourrait évoluer au-delà de 2026. L’éventualité d’une hausse des recettes issues des impôts complémentaires au cours des prochaines années dépend également de l’introduction ou non de l’impôt minimum de l’OCDE par d’autres pays. Par ailleurs, la Suisse pourra également prélever à partir de 2025 des impôts complémentaires sur les filiales étrangères de groupes suisses qui ne sont pas redevables d’impôts complémentaires dans leur pays d’origine du fait que ce dernier ne participe pas à l’impôt minimum de l’OCDE. Il pourrait en résulter une hausse des recettes fiscales.
Dans la présente étude, Deloitte Suisse analyse l’impact financier de l’impôt minimum de l’OCDE sur les 50 plus grands groupes suisses cotés en bourse ainsi que les retombées fiscales supplémentaires potentielles pour la Suisse. Étant donné que l’exercice financier de certains groupes ne coïncide pas avec l’année civile, la présente étude se limite à un peu moins de cinquante groupes.
Seules les données et les informations accessibles au public issues des états financiers audités (IFRS, US GAAP), des présentations aux investisseurs et des déclarations officielles des directeurs financiers ont été utilisées aux fins de l’étude.
L’étude s’attarde sur les questions principales suivantes :
En raison de l’absence d’exigences de divulgation pour les groupes suisses non cotés et les filiales suisses de groupes étrangers, aucune donnée ni information accessible au public n’est disponible pour deux catégories de groupes concernés. Par conséquent, aucune analyse ne peut être réalisée concernant ces deux groupes. Toutefois, Deloitte Suisse estime que dans le cadre de la présente étude, certaines conclusions tirées de l’analyse des groupes suisses cotés peuvent être transposées aux groupes suisses non cotés.
La méthodologie retenue pour déterminer l’ampleur de l’impact pour chaque groupe (classé comme faible, moyen ou élevé) est la suivante :